vendredi 5 juin 2015

Hydro restera une bébelle politique

5 juin 2015 – Source : Journal de Montréal

La nomination de M. Éric Martel au poste de président-directeur général d’Hydro-Québec me rend très sceptique sur le virage qu’il pourra imposer dans la gestion et les pratiques d’affaires de notre plus importante société d’État. Je n’ai pas entendu ce que j’aurais voulu entendre et sur un ton qui m’aurait plu.

D’abord, on ne me fera jamais croire qu’il était le premier choix pour cette haute fonction, unique.

Il atterrit de plus chez Hydro après un décollage de chez Bombardier, où il était à la direction de la division Avions d’affaires. Il a été démis il y a deux semaines après avoir dû mettre à pied 1750 personnes parce que l’avionneur ne réussissait pas à commercialiser et à livrer ses récents modèles de ce type d’appareils.

Il n’arrive pas à Hydro avec un dossier de gagnant.

De plus, il n’a aucune expérience dans le secteur de l’énergie. Les experts interrogés sur sa nomination ont insisté sur cette grave lacune, dans une période de fortes turbulences à la fois à l’interne chez Hydro et dans ses marchés externes.

Des clichés

Mais surtout, je n’ai entendu mercredi qu’une litanie de clichés de la part du ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Arcand, et de M. Martel: changement de culture, meilleures relations avec la clientèle, croissance, hausse de la productivité, etc.

M. Martel s’est aussi engagé à ce que les prochaines hausses de tarifs soient «raisonnables». J’avais entendu cela avant des hausses de 7,2 % en un an.

Interventionnisme politique

Le nouveau PDG d’Hydro-Québec n’a pas exigé, par contre, une plus grande indépendance de la direction d’Hydro face au pouvoir politique.

Le ministre des Finances continuera de passer des commandes de dividendes toujours plus élevés, budget après budget. Le gouvernement continuera d’ordonner la mise à niveau d’une centrale nucléaire et le suivant l’annulera, après dilapidation de 1 milliard $.

Pour s’acheter des votes verts, une ministre doctrinaire pourra encore dicter l’achat d’électricité provenant de la filière éolienne, à trois fois le coût du kilowatt produit par les propres centrales hydroélectriques d’Hydro-Québec, qui ne sait même plus quoi faire de ses surplus. Ou l’installation de bornes de chargement le long des routes pour les quelques milliers d’automobiles mues à l’électricité.

L’interventionnisme politique purement partisan a coûté plusieurs milliards aux consommateurs québécois.

La construction de centrales a été devancée en faisant miroiter des exportations qui feraient des Québécois les scheiks du Nord. Il suffisait de modifier les prévisions de ventes de la société d’État. On s’est lancé puis on a reculé sur l’achat d’électricité provenant de minicentrales; on a englouti des sommes astronomiques dans le développement de moteurs-roues et de batteries, recherches qui n’ont jamais abouti.

Hydro-Québec a fait une incursion désastreuse dans le nucléaire, toujours sur un ordre politique.

Aussi longtemps qu’Hydro-Québec sera instrumentalisée par le pouvoir politique, le consommateur en paiera la note et je ne crois aucunement que cela changera sous Éric Martel. J’ai plutôt retenu de ses propos que les relations entre le gouvernement actionnaire et la direction d’Hydro demeureront ce qu’elles sont.

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